Anas bahamensis

Famille : Anatidae

DAVIDE-2.gif
Texte © Dr Davide Guadagnini

 

catherine_collin.gif
Traduction en français par Catherine Collin

 

Anas bahamensis est largement répandu sur le continent américain avec trois sous-espèces. Il est petit et fin, avec une taille d’environ 38-51 cm de long, pesant 470-535 g et mesurant 55-68 cm d’envergure © G. Mazza

Anas bahamensis est largement répandu sur le continent américain avec trois sous-espèces. Il est petit et fin, avec une taille d’environ 38-51 cm de long, pesant 470-535 g et mesurant 55-68 cm d’envergure © Giuseppe Mazza

Le Canard des Bahamas ou Pilet des Bahamas (Anas bahamensis Linnaeus 1758) est un discret mais très gracieux canard qui appartient à l’ordre des Ansériformes (Anseriformes), à la famille des Anatidés (Anatidae), au vaste genre Anas et à l’espèce Anas bahamensis.  

L’espèce compte trois sous-espèces : Anas bahamensis  bahamensis  Linnaeus, 1758, qui est l’espèce nominale et le véritable canard des Bahamas ; Anas bahamensis galapagensis Ridgway, 1890, qui est le canard des Bahamas vivant aux Iles Galápagos et Anas bahamensis rubrirostris qui est le canard des Bahamas vivant en Amérique du sud.

Le nom de genre “Anas” vient des termes latins “anas, anatis”, qui veulent simplement dire “canard”. Le terme indiquant l’espèce “bahamensis” fait référence à l’aire de répartition de cette sous-espèce au niveau des petites et grandes Antilles et ici, précisément, les Bahamas.

Zoogéographie

L’espèce, comprenant trois sous-espèces différentes et éloignées, est amplement mais irrégulièrement distribuée au nord de l’Amérique du sud et dans les îles des petites et grandes Antilles et des Caraïbes. Elle est également irrégulièrement présente en Floride et dans le reste des Etats-Unis (Anas bahamensis bahamensis). Elle est aussi présente dans une vaste ceinture au centre de l’Amérique du sud, à l’est de la Bolivie et, du sud du Brésil à l’Uruguay et à l’Argentine ainsi qu’occasionnellement sur les îles Malouines (Anas bahamensis rubrirostris) et sur les îles Galápagos (Anas bahamensis galapagensis).

Ecologie-Habitat

Ces canards ont tendance à se cacher au plus profond de la végétation dense. De petits groupes peuvent se réunir dans des eaux saumâtres, dans des zones marécageuses ou sujettes à des variations du niveau de l’eau dues aux marées, dans des anses, des estuaires, des étendues boueuses et parfois des milieux en eau salée. Le canard des Bahamas fréquente également les eaux douces intérieures comme le bassin amazonien où il peut être la proie de grands poissons comme l’Arapaïma (Arapaima gigas).

La tache blanche qui part de l’attache du bec et se poursuit sous l’œil jusqu’au cou est très caractéristique © Giuseppe Mazza

La tache blanche qui part de l’attache du bec et se poursuit sous l’œil jusqu’au cou est très caractéristique © Giuseppe Mazza

Morpho-physiologie

C’est un canard mince et de petite taille, long d’environ 38-51 cm. Il pèse en moyenne de 470 à 535 g et est doté d’une envergure de 55 à 68 cm. Le canard des Bahamas a de larges taches blanches sur les joues qui contrastent avec le reste de la tête (front, sommet de la tête et arrière du cou de couleur marron foncé) et du corps (toujours majoritairement marron foncé).

Cette tache blanche distinctive part de l’attache du bec (sauf dans la portion dorsale) et se poursuit sous l’œil en s’incurvant vers le dessous de la gorge et se prolonge par un trait bref au niveau de l’attache du cou et du ventre formant une seule tache qui s’étend au niveau des deux joues.

Le corps, comme nous l’avons dit, est marron-brun chaud et fortement tacheté de marron très foncé-noir. Le dos est dans son ensemble plus sombre. Le canard des Bahamas a un miroir alaire vert iridescent bordé de noir et “inséré” dans une partie des ailes où la couleur entourant le miroir alaire lui-même, est café au lait clair-cannelle. La queue se caractérise par ses plumes rectrices pointues de couleur marron clair estompée en gris-blanchâtre sur le dos et entièrement gris clair-blanchâtre sur le ventre. Dans l’ensemble la queue a une coloration qui se distingue du reste de la livrée comme une sorte de “coup de pinceau” clair.

Le bec est de couleur gris-bleuâtre dans la partie dorsale et distale, latéralement noirâtre avec une tache rouge carmin-orangé très visible au niveau de la base de la ramphothèque supérieure et qui s’étend sur moins de la moitié du bec (en passant sous la narine). Cette tache colorée s’étend vers l’attache dorsale du bec, se terminant en forme arrondie dans les deux directions. L’iris est marron foncé et l’œil est peu apparent se perdant dans la portion marron de la tête où il est situé. Les pattes sont grises estompées de jaunâtre. A la différence des autres espèces de canards pilets (nordiques) le plumage d’éclipse n’existe pas chez ce canard et la couleur du plumage reste la même toute l’année.

Nageur habile, le Canard des Bahamas ou Pilet des Bahamas (Anas bahamensis) s’immerge tête la première dans les eaux peu profondes à la recherche de végétaux et de petits invertébrés © Mazza

Nageur habile, le Canard des Bahamas ou Pilet des Bahamas (Anas bahamensis ) s’immerge tête la première dans les eaux peu profondes à la recherche de végétaux et de petits invertébrés © Mazza

Les deux sexes sont semblables mais la femelle est généralement plus petite et a une livrée plus mate. Son bec est plus mat et sa queue est plus courte (tout en étant pareillement pointue). Les jeunes sont semblables à la femelle mais sont plus mats et ont un miroir alaire moins iridescent.

La sous-espèce d’Amérique du sud (Anas bahamensis rubrirostris) est plus grande et possède une livrée légèrement plus lumineuse par rapport à la sous-espèce nominale (Anas bahamensis bahamensis).

Éthologie-Biologie reproductive

La sous-espèce du sud (Anas bahamensis rubrirostris), a de plus grandes dimensions et une livrée plus lumineuse par rapport aux deux autres sous-espèces et bien qu’elle vive majoritairement dans des zones tropicales de plaines, on la retrouve régulièrement aux environs de 2 500 mètres en Bolivie et un spécimen a même été vu à plus de 4 000 mètres au Pérou. L’espèce vivant aux Galápagos (Anas bahamensis galapagensis) est la plus petite des trois sous-espèces. Le blanc de ses joues et de sa gorge est moins défini et moins blanc. Son bec manque également d’intensité par rapport aux deux autres sous-espèces. Le canard des Bahamas vivant aux Galápagos est le seul canard endémique de ces îles ravissantes où il se présente comme un animal très sociable.

Même si les îles Galápagos ont environ trois millions d’années, on pense que les canards s’y sont installés (en se différenciant de ceux restés aux Bahamas) il y a environ 10 000 ans après l’apparition de zones humides convenant à leurs habitudes alimentaires. Même si le canard des Bahamas n’a pas des habitudes migratoires la sous-espèce rubrirostris a des mœurs vagabondes quand la saison de la reproduction est terminée. Ces canards ont un vol typique des pilets, rapide et agile. Le canard des Bahamas peut vivre seul, en couple ou en petits groupes. Les compagnies comptant de nombreux spécimens sont en revanche plutôt rares, ou occasionnelles, si la nourriture se révèle abondante.

Les mâles de cette espèce émettent de bas sifflements et des sons ressemblant à des grincements. Les femelles au contraire émettent de faibles mais répétés “qua-quack”. Les canards des Bahamas se nourrissent en eau peu profonde immergeant leur tête et leur cou et se tenant ainsi en position verticale. Leur régime est constitué principalement de végétaux (herbes, graines, bourgeons, tiges, feuilles de plantes des marais ou aquatiques). Ce régime comprend également des aliments d’origine animale principalement des invertébrés aquatiques.

La période de la reproduction est très variable et est plus liée à la présence et au niveau des eaux qu’à une période de l’année définie. Ce canard établit des liens de couple assez forts mais de durée variable et incertaine (monogame non strict) avec de nombreuses exceptions. Le nid est généralement construit sur le sol, dans la végétation dense ou entre les racines d’un arbre à proximité de l’eau. La couvée est généralement constituée de 5 à 12 œufs de couleur blanc-crème/cuir. Les œufs sont couvés pendant environ 25 jours par la femelle. Les canetons ont la partie supérieure marron avec des taches jaunâtres et la partie inférieure pratiquement jaune. La tête est jaune avec le sommet marron comme l’est aussi la rayure qui la traverse. L’œil est marron comme les taches sur les oreilles. Les mâles accompagnent parfois les canes avec la couvée mais ne sont probablement pas intéressés par l’éducation des canetons.

Ce canard se reproduit quand le niveau d’eau est optimal. La cane couve 5-12 œufs durant 25 jours et les mâles s’occupent aussi des canetons qui sont souvent réunis dans des

Ce canard se reproduit quand le niveau d’eau est optimal. La cane couve 5-12 œufs durant 25 jours et les mâles s’occupent aussi des canetons qui sont souvent réunis dans des "nids nurseries". L’espérance de vie est de 14 ans © Giuseppe Mazza

Peu après la naissance les canetons sont emmenés en sécurité dans l’eau où ils sont en mesure de s’immerger pour fuir les prédateurs.

Parfois plusieurs couvées sont réunies afin de former des “couvées de type nurserie” de grandes dimensions. Les jeunes ont leur plumage complet à 45-60 jours et peuvent se reproduire à un an.

Bien que l’espèce présente une répartition “en taches” les deux sous-espèces avec une “large distribution” sont encore relativement abondantes. La distribution de l’espèce s’est pourtant notablement réduite à une série d’îles caribéennes à cause de l’excessive pression de la chasse et de l’introduction de mammifères prédateurs allochtones (venant d’ailleurs) qui détruisent les couvées. Le canard des Bahamas est abondant au Brésil et en Argentine.

La sous-espèce des Galápagos, déjà rare du fait d’occuper un territoire restreint, subit également l’action négative du tourisme et de l’introduction de mammifères prédateurs allochtones. Le canard des Bahamas est répandu chez les éleveurs amateurs qui le sous-estime peut-être un peu. Les spécimens élevés sont rarement génétiquement purs étant issus de croisements entre les deux sous-espèces bahamensis et rubrirostris. Les aviculteurs ont sélectionné une forme leucique (albinos partiel) avec une livrée gris clair appelé “canard pilet des Bahamas argenté” qui est abondamment répandu en captivité (il existe également d’autres mutations moins communes). La sous-espèce des Galápagos réussit rarement a survivre en captivité ; quelques résultats positifs ont été obtenus par des éleveurs allemands.

Ce canard élégant, gracieux et discret peut avoir une espérance de vie d’environ 14 ans.

 

→ Pour apprécier la biodiversité au sein des ANSERIFORMES cliquez ici.