Dendrocygna bicolor

Famille : Anatidae

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Texte © Dr Davide Guadagnini

 

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Traduction en français par Catherine Collin

 

Grégaire, bruyant, principalement tropical et subtropical, Dendrocygna bicolor est quasiment cosmopolite © Giuseppe Mazza

Grégaire, bruyant, principalement tropical et subtropical, Dendrocygna bicolor est quasiment cosmopolite © Giuseppe Mazza

Le Dendrocygne fauve (Dendrocygna bicolor Vieillot 1816) est sans doute le plus célèbre des canards du groupe nommé “dendrocygnes”. Il appartient à l’ordre des Anseriformes, à la famille des Anatidae, au genre Dendrocygna et à l’espèce Dendrocygna bicolor.

Le nom de genre “Dendrocygna” vient du grec “dendron” = arbre et du latin “cygnus” = cygne et donc, signifie “cygne des arbres” en référence aux habitudes arboricoles de certaines des espèces appartenant à ce genre ainsi qu’au fait qu’ils évoquent de petits cygnes.

Le nom latin de l’espèce dérive de “bis” = deux fois et “color” = couleur, donc : bicolore en référence à sa livrée.

Zoogéographie

Espèce monotypique, c’est l’espèce de dendrocygnes la plus répandue.

Son aire de répartition passe par divers continents et comprend de nombreuses îles : il est présent dans une grande partie de l’Amérique centrale et du sud, à Hawaï, le long de la côte du golfe aux USA, en Afrique subsaharienne et à Madagascar, en Inde et dans certaines parties de l’Asie du sud.

Écologie-Habitat

Il s’agit d’une espèce principalement tropicale et subtropicale et elle se reproduit naturellement aussi bien dans l’hémisphère nord que sud par rapport à l’équateur. Malgré la grande distribution de l’espèce, pratiquement cosmopolite, il n’y a pas de variations significatives de taille et de couleur entre les différentes populations existantes, en faisant abstraction des grandes divisions géographiques. En général, cette espèce fréquente des habitats marécageux, lacs et étangs,lagunes côtières saumâtres et campagnes ouvertes et plates. Elle privilégie les endroits herbeux où les hautes herbes sont abondantes.

Morpho-physiologie

Le dimorphisme, chez ce genre, (Dendrocygna spp.), n’est pas évident même si parfois les comportements et les formes légèrement pesantes et arrondies du ventre de la femelle prête à pondre ou en période de ponte peuvent permettre à un “œil averti” de distinguer les sexes.

Il se nourrit surtout de végétaux mais également d'insectes, mollusques et crustacés © Gianfranco Colombo

Il se nourrit surtout de végétaux mais également d'insectes, mollusques et crustacés © Gianfranco Colombo

Les dendrocygnes ont une conformation particulière : cou et pattes relativement longs, larges pieds palmés dotés d’ongles robustes et effilés. Ils ont une posture très droite avec le tronc tenu verticalement par rapport aux canards typiques. Leur allure très “détachée du sol”, est élégante et gracieuse.

Des ailes courtes, larges, arrondies avec les primaires et les secondaires de même longueur caractérisent toutes les espèces. Chez certaines espèces les ailettes intérieures des rémiges primaires externes sont très découpées et dentelées, vibrant en vol et générant un sifflement ou un bourdonnement mécanique distinctif.

En vol ils portent la tête et le cou légèrement abaissés et tendus bien en avant, la posture est un peu bossue ; les pattes, longues (bien plus que la courte queue), simulent une queue longue et pointue. Ils ont un vol avec des battements d’ailes plutôt lents et profonds, le vol étant un peu papillonnant et très gracieux. Beaucoup d’espèces volent également de nuit. Ce sont essentiellement des canards de plaines et ils vivent dans des milieux chauds. Certaines espèces ont des habitudes nocturnes, certaines sont arboricoles, d’autres purement terrestres.

Le dendrocygne fauve a une forme typique de dendrocygne. Il est long d’environ 45-53 cm et pèse environ 621-755 g. Le dendrocygne fauve est appelé ainsi à cause de la coloration plutôt uniforme brun-jaunâtre-peau de buffle-cannelle présente sur une grande partie de son corps : côtés de la tête, cou, flancs et ventre.

Le dos et les parties dorsales du cou (se prolongeant de la calotte qui est marron-châtaigne plus vif) sont de couleur marron-foncé presque noir. Le croupion est sombre également. Les plumes de couverture, marron foncé elles-aussi, ont les parties terminales de couleur roussâtre-cannelle qui forment des sortes de “capes” plus claires sur fond sombre. La partie ventro-latérale-médiane du cou présente une sorte de tache non définie nuancée de jaunâtre clair-blanchâtre-argenté ; dans cette partie les plumes semblent disposées en “petites touffes” formant de légères rayures-petits sillons en bas-relief. Sous la zone que nous venons de décrire, le reste du cou vers le ventre et la poitrine a des tons plus jaunâtre-doré.

La tête se termine par une petite touffe arrière, à peine évidente, portée horizontalement et légèrement érectile. Sur les flancs sont présents des dessins en forme de faux quasiment blancs, blanc-crème qui concernent la moitié des plumes latérales allongées. Le dessous de l’aile est marron foncé intense. La queue est sombre-noirâtre, comme la partie dorsale antérieure du dessus de la queue. Le dessus de la queue, clair, presque blanc-crème est très visible quand l’oiseau est en vol. La sous-queue est claire également.

Le dendrocygne fauve est doté de grands pieds gris largement palmés qui en font un excellent nageur, bien meilleur que ses congénères, même si lorsqu’il nage il manque de style et de grâce. Le bec est grand, de couleur gris-asphalte avec un onglet très prononcé. L’œil est brun-sombre. Les juvéniles ont une livrée plus mate et les parties latérales moins claires.

Il vole en sifflant, également dans le noir, et ses grands pieds palmés en font un très bon nageur © Giuseppe Mazza

Il vole en sifflant, également dans le noir, et ses grands pieds palmés en font un très bon nageur © Giuseppe Mazza

Éthologie-Biologie reproductive

Cette espèce vocalise beaucoup quand elle vole émettant des chants stridents semblables à ceux du pluvier (genre Charadrius).

Lorsqu’ils s’alimentent, les groupes sont particulièrement bruyants, à tel point que les mexicains ont donné à ce dendrocygne le nom de “geignard” ou de “pleureur”.

Ces petits sifflements continus, très plaisants à entendre, contribuent à maintenir l’unité familiale et la cohésion à l’intérieur du groupe. Ce dendrocygne court agilement et ne se pose que rarement sur les arbres (spécialement dans le nouveau monde). En général, il nage lentement tenant haut sa tête. C’est un habile plongeur bien qu’un peu gauche dans ses mouvements.

Bien qu’étant une espèce assez querelleuse, elle a des habitudes grégaires, se réunissant en grands groupes afin de se nourrir et de se reposer. Le dendrocygne fauve, comme le dendrocygne veuf (Dendrocygna viduata) avec lequel il partage les sites d’alimentation, a des habitudes alimentaires omnivores mais à forte tendance végétarienne, se nourrissant de graines variées et de céréales, de carex, d’herbes, de plantes aquatiques, de bulbes, de tubercules et de fruits variés. Surtout pendant la période de reproduction, il intègre à son régime alimentaire des aliments d’origine animale comme des insectes aquatiques, des larves, des limaces, et des crustacés même si ceux-ci ne constituent jamais une part importante de son alimentation. Bien qu’étant un canard assez timide il se laisse plus facilement approcher que nombre d’espèces sauvages. Il a des habitudes essentiellement nocturnes ou crépusculaires, il n’a aucun problème pour voler dans le noir, souvent en formations irrégulières. Être survolé dans le noir par un groupe de ces canards sifflants fortement (sans les voir ou presque) est très frappant.

L’espèce est donc pour la plus grande part sédentaire même si certains dendrocygnes peuvent effectuer des déplacements saisonniers. Certaines populations peuvent se révéler être hautement nomades. La majeure partie de la population au nord du Rio Grande se déplace vers le sud en automne ce qui fait que quelques individus sont victimes des chasseurs américains mais ils sont également fortement chassés au Mexique. Les comportements lors de la reproduction sont semblables à ceux du dendrocygne veuf (Dendrocygna viduata).

Sous les tropiques les paysans détruisent les nids de Dendrocygna bicolor à cause des dommages causés aux rizières, aux États-Unis cette espèce est malheureusement menacée par les pesticides © Giuseppe Mazza

Sous les tropiques les paysans détruisent les nids de Dendrocygna bicolor à cause des dommages causés aux rizières, aux États-Unis cette espèce est malheureusement menacée par les pesticides © Giuseppe Mazza

Leurs nids vont de la simple dépression creusée sur le terrain ou entre les touffes d’herbe, à des réalisations plus complexes en forme de panier plutôt haut, parfois dotées d’une coupole, assemblées en triant et entrelaçant de longues tiges d’herbe. Pour nicher, ils peuvent également utiliser des cavités dans les arbres ou même les nids d’autres oiseaux.

En Amérique, l’espèce niche de préférence à terre alors qu’en Inde elle utilise majoritairement des cavités et des nids abandonnés surélevés. Elle peut également nicher à quelques mètres au-dessus du sol. Parfois, des nids communs sont réalisés qui contiennent de nombreux œufs.

Les œufs sont plutôt arrondis et ont une coloration blanc ivoire-crème, ils ont des dimensions moyennes de 53 mm par 38 mm et un poids autour de 50 g. L’incubation dure 24-25 jours.

Les canetons sont d’un marron plus brumeux avec la calotte marron plus franc et une large partie latérale, au niveau des joues, blanchâtre qui s’enroule autour de la nuque et se retrouve sous la gorge. Des nuances blanchâtres sont présentes au niveau de l’aile, de la poitrine et de la queue.

Ces canards sont très attirés par les rizières et les champs de céréales, pour cela ils sont considérés comme des parasites par les agriculteurs qui souvent détruisent les nids. La période de reproduction dans les zones tropicales commence d’habitude à la fin de la saison des pluies. L’espèce ne semble pas menacée d’extinction, à part à Madagascar et dans une partie du sous-continent indien.

Aux États-Unis, autour des années 60, il y eu une hécatombe de dendrocygnes fauves due à l’utilisation de pesticides toxiques sur les cultures de riz. Suite à la réduction de l’usage des pesticides hydrocarbonés chlorés non sélectifs, il y a eu un accroissement de la population locale sans toutefois atteindre à nouveau le grand nombre d’individus d’avant 1940. La population américaine est estimée à un peu moins d’un million d’individus. En Afrique elle doit atteindre environ le nombre de 625 000 individus. En Asie du sud, la population, avec environ 20 000 individus semble stagner. En captivité, l’espèce est abondante et son élevage s’avère assez aisé.

 

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