Panthera tigris

Famille : Felidae

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Texte © D. Sc. Giuliano Russini – Biologiste Zoologiste

 

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Traduction en français par Béatrice Udé

 

Avec moins de 2 000 individus en liberté, le Tigre du Bengale est en danger d'extinction © Giuseppe Mazza

Avec moins de 2 000 individus en liberté, le Tigre du Bengale est en danger d’extinction © Giuseppe Mazza

Le Tigre (Panthera tigris Linnaeus, 1758) est un grand et puissant félin, dont les dimensions et la dangerosité sont équivalentes à celles du Lion d’Afrique (Panthera leo), alors que le Lion asiatique (Panthera leo persica), une sous-espèce du lion africain, est un peu plus petit.

Le Lion d’Afrique, contrairement aux idées reçues, est, probablement à cause de ses manifestations d’agressivité, plus dangereux que le Tigre dans la nature et plus difficile à gérer en captivité, comme l’ont observé les biologistes.

Les dimensions aussi, qui de manière quasi légendaire, sont pensées supérieures chez le Tigre, présentent en réalité une forte et vraie similitude, même si ce dernier a une masse musculaire inférieure à celle du Lion africain et un pannicule adipeux plus élevé. Ceci, dû au phénomène de réchauffement corporel, est en fait un handicap en cas de combat prolongé. Cet inconvénient ne se rencontre pas chez le lion qui, comme le dit le dicton, “se bat jusqu’à la mort”.

Il en va de même pour les techniques de combat, qui sont toutes en faveur de Panthera leo, habitué à se confronter dans la savane à une grande variété de proies et de compétiteurs, contrairement au tigre solitaire, qui, si l’on oublie le Léopard (Panthera pardus) et la Panthère noire, qui est la forme mélanique du Léopard, ainsi que le Dhole (Cuon alpinus), quelques gavials, crocodiles et éventuellement des pythons, rencontre très peu d’animaux contre lesquels combattre dans son biotope (voir fiche Felidae et Panthera leo).

L’éléphant asiatique (Elephas maximus), mis à part les petits et quelques individus malades ou très âgés, est l’unique espèce que le tigre évite d’attaquer, au vu de son imposante taille ; et en effet, en Inde, au Sri Lanka et dans d’autres régions de l’Indochine, les habitants locaux utilisent souvent ces colosses pour transporter les charges en longues caravanes ou pour faire voyager les touristes, certains qu’en leur présence le tigre n’attaquera pas. Bien qu’ils soient équipés de fusils, l’éléphant reste la meilleure force de dissuasion, car le tigre est imprévisible et frappe mortellement à l’improviste : les propriétés “somatiques” de sa fourrure le rendent en effet quasi invisible dans la forêt et dans les zones humides à roseaux, sans même parler de ses silencieux mouvements.

Les rhinocéros asiatiques peuvent eux aussi donner du fil à retordre à ces félins, mais sans oublier que lorsqu’un tigre est affamé, nerveux, ou s’il s’agit d’une mère voyant ses petits en danger, il n’hésitera pas à attaquer le rhinocéros, car comme le lion, c’est un animal très courageux. De la même manière qu’il existe des lions solitaires, mangeurs d’Homme, le tigre aussi peut faire de même. Surtout dans le passé, de nombreux cas d’attaques mortelles ont été recensés en Asie, spécialement à proximité des villages, au détriment d’hommes et d’enfants. Il faut cependant ajouter que, comme il arrive souvent, ces phénomènes ont été exagérés négativement par les populations locales, à travers les contes et légendes.

C’est l’avis du biologiste zoologue anglais DrSc George Schaller, qui pendant 40 ans, a étudié ces animaux dans la nature et qui estime qu’une certaine forme de coévolution éthologique s’est vérifiée, une sorte de “domestication spontanée” entre ce félin et l’être humain, beaucoup plus forte que chez les lions. A moins qu’ils ne soient affamés, apeurés ou agressés, les tigres ont donc appris à éviter l’homme, alors que les lions restent plus agressifs. Mais ceci n’est pas suffisant pour inverser la mauvaise réputation donnée par les récits exagérés qui ont marqué ce pauvre animal, sujet dans le passé à de véritables massacres perpétrés par les chasseurs, à tel point que cette espèce est devenue l’une des plus menacées, comme l’IUCN l’a déclaré dans les années 1970, la classant dans la “Liste Rouge des espèces en danger”.

Aujourd’hui on ne sait pas vraiment combien de tigres (toutes les espèces et sous-espèces connues sont en train d’être recensées par les biologistes zoologues et les rangers du programme du Taxon Advisory Group “TAG”) sont encore vivants et libres dans la nature, mais il semble que “malheureusement”, ce nombre ne dépasse pas 2 000 individus, et cela est sans doute une estimation optimiste !

Il craint seulement les éléphants et les bandes de loups mais son véritable ennemi est l'homme © Giuseppe Mazza

Il craint seulement les éléphants et les bandes de loups mais son véritable ennemi est l’homme © G. Mazza

Cette page vaut pour l’espèce indienne (Panthera tigris), la sous-espèce de Sibérie (Panthera tigris longipilis, appelée par d’autres auteurs Panthera tigris altaica -Temminck, 1844) ainsi que pour les hybrides à manteau blanc, qui sont les plus grands du groupe par la taille, la sous-espèce de Java et de Sumatra (Panthera tigris sondaica), et enfin celle du Bengale (Panthera tigris tigris), qui avec celle de Sibérie est la plus menacée.

Le Tigre de Sibérie (Panthera tigris longipilis ou altaica), pour s’adapter aux rudes climats de la Sibérie et de la Mongolie, a développé un manteau beaucoup plus long que chez les autres espèces ; de temps en temps, il peut y avoir des phénomènes d’hybridation du tigre de Sibérie avec d’autres espèces ou sous-espèces ou encore de dérive génétique, telle que la coloration blanche de la fourrure, qui mime parfaitement la neige. C’est, parmi tous les tigres, aussi bien espèces que sous-espèces, la plus grande mais aussi, actuellement, l’une de celles présentant le plus fort risque d’extinction.

Dans certaines zones comme la Chine méridionale, le Sud-est asiatique, le Pakistan, l’Iran, l’Irak, où vivaient certaines espèces et sous-espèces jusque dans les années 1950, les tigres ont désormais pratiquement ou totalement disparu par la faute de l’Homme, plus particulièrement à cause de la chasse sportive, de la recherche de trophées ou pour fournir des organes (dents, foie, vésicule biliaire, yeux) à la médecine chinoise, exploitant la stupide croyance en des propriétés curatives ou même aphrodisiaques inhérentes à ces organes, sans parler des phénomènes de braconnage liés au commerce de dents et de fourrures destinés à l’étranger. Et comme si cela ne suffisait pas, l’homme est en train de détruire avec ses activités les biotopes dans lesquels vivent les quelques populations restantes.

Avant de décrire la zoogéographie, l’écologie-habitat, la morpho-physiologie et la biologie reproductive, ainsi que l’éthologie de ce splendide carnivore de la famille des Felidae, je voudrais mentionner brièvement la relation qu’a entretenue le tigre avec l’histoire humaine. Pour les civilisations occidentales, le tigre est longtemps resté inconnu. Les premiers tigres vivants, probablement persans, arrivèrent en Europe seulement vers la fin de l’empire romain. Comme le veut la logique, ce félin a eu un rôle de premier plan dans les légendes et mythologies des populations orientales, qui voyaient dans celui-ci un symbole de force et de férocité. Le tigre était vénéré par les peuples d’Asie du Nord-Est, même si ensuite, en réalité, il fut combattu avec acharnement par l’homme ; et ceci s’est vérifié aussi en Inde, où en général le respect des animaux est très grand par rapport au reste du monde.

Contrairement au chat, le tigre aime l'eau et surprend ses proies quand celles-ci s'abreuvent © Giuseppe Mazza

Contrairement au chat, le tigre aime l’eau et surprend ses proies quand celles-ci s’abreuvent © Giuseppe Mazza

D’autre part, il ne faut pas oublier, comme mentionné ci-dessus, que par le passé, nombre d’hommes et d’enfants mouraient victimes du tigre, et qu’en de telles circonstances il fallait se défendre, et qu’il était difficile de maintenir une attitude amicale envers l’espèce, comme s’il s’agissait d’un animal domestique.

A la différence des lions vieux ou malades trop lents pour attraper de véloces ongulés, l’anthropophagie n’est pas un phénomène fréquent chez le tigre, qui attaquait et attaque seulement parce que les villages sont créés à proximité de la jungle, dans son territoire de chasse. Dans leur biotope naturel, la jungle tropicale épaisse et impénétrable ou les zones humides à roseaux dans lesquelles leur mimétisme est parfait, les tigres ont pu développer une technique de chasse différente des autres félins, une sorte de guérilla, un “tu mords et tu t’enfuis” basé sur une embuscade, parfois aux frais de l’imprudence humaine.

La chasse au tigre s’effectue généralement à l’aide d’un piège où l’animal est attiré avec un appât vivant, comme une chèvre ou un mouton attaché à un pieu, pendant que les chasseurs sont positionnés sur une plateforme à 10-12 m du sol, prêts à tirer.

Mais il peut aussi s’agir d’un système de cage. Le tigre est attiré par les cris du leurre vivant situé à l’intérieur, et entre, actionnant ainsi des mécanismes qui referment immédiatement derrière lui une robuste porte.

La chasse libre, surtout pratiquée dans le passé, jusqu’au début du XXème siècle, par les nobles indiens, chinois et par les colons anglais, se déroulait en revanche avec un grand nombre de personnes afin d’éviter les risques. Une activité ludique, à l’instar de celle qui à l’époque et encore aujourd’hui est pratiquée par les nobles anglais aux dépens du pauvre Renard roux (Vulpes vulpes).

Ses proies préférées : sangliers, antilopes, cerfs, nilgauts et buffles d'eau © G. Mazza

Ses proies préférées : sangliers, antilopes, cerfs, nilgauts et buffles d’eau © G. Mazza

Le noble de service était calmement assis sous une canopée portée par un éléphant d’Asie, alors que des dizaines et des dizaines de rabatteurs à pied ou à cheval encerclaient le félin, avec de grands cris et clameurs, le menant jusqu’à portée de tir de leur maître.
En Chine, pour le capturer, on utilisait aussi des filets.

Zoogéographie

Par le passé, Panthera tigris présentait une aire de répartition qui s’étendait, avec les différentes sous-espèces qui le caractérisent, de la Russie-Sibérie à l’Inde, Java, Sumatra, jusqu’à la Chine méridionale, la Perse (Iran) et la Mésopotamie (Irak), avec des individus (espèce et sous-espèce) qui pouvaient rôder aussi en Asie mineure et en Turquie.

Aujourd’hui, il reste des populations très restreintes en Inde, en Chine méridionale (ou peut-être déjà disparues), Sibérie, Mongolie, Mandchourie, Bengale, Indochine, sur les Îles de la Sonde (Sumatra, Java) et en Corée du Nord et du Sud. Et comme déjà dit précédemment, le Tigre du Bengale et le tigre de Sibérie sont les deux espèces les plus menacées d’extinction.

Morpho-physiologie

Le tigre est avec le lion un carnivore utéro-placentaire de grande taille, tous deux seulement dépassés par l’ours.

Il présente une élégante livrée à bandes noires sur un manteau jaune-roussâtre, qui lui permet de se confondre dans son biotope grâce au phénomène de “somatolyse”. Le manteau de l’animal est essentiellement absorbé par le chromatisme et les jeux de lumière de l’environnement, qui empêchent, lorsque le tigre est immobile, de discerner son profil.

C’est aussi le cas du tigre de Sibérie (Panthera tigris longipilis) dont le manteau d’hiver très clair s’adapte parfaitement à la neige, compte tenu qu’en Sibérie et en Mongolie, où il vit, les hivers sont immanquablement longs et enneigés. L’été, très court, dure au maximum un mois et demi. Il s’agit donc d’un exemple classique d’adaptation écoévolutive. Ce puissant animal peut atteindre, chez les plus grands exemplaires comme le tigre de Sibérie, 3,5 m de long, dont un mètre rien que pour la queue. La hauteur au garrot peut atteindre 120 cm, et le poids peut dépasser 300 kg. La sous-espèce de plus petite taille est le tigre du Bengale (Panthera tigris tigris), probablement parce qu’il vit toujours au beau milieu de la jungle, dans des espaces restreints, alors que le tigre indien se déplace dans des espaces plus vastes, dans les zones humides à roseaux, et celui de Sibérie dans les grandes clairières enneigées.

Le tigre a une silhouette élancée, avec un tronc fortement comprimé sur les côtés et une hauteur presque toujours constante selon l’espèce ou la sous-espèce. Les épaules présentent cependant une forte saillance.Contrairement au lion, il a un corps plus arrondi et moins massif, avec des pattes plus élancées qui lui garantissent des sauts plus longs et une meilleure capacité à grimper dans les arbres.

Il ne dédaigne pas les poissons, et se révèle être un excellent nageur © Giuseppe Mazza

Il ne dédaigne pas les poissons, et se révèle être un excellent nageur © Giuseppe Mazza

Mais la plus grande différence se situe au niveau de la fourrure : celle du lion est rase et courte, de couleur noisette brun-beige, parfois tachetée de doré, qui imite bien la savane.

Il a une queue robuste qui se termine par un pinceau, et possède en plus une puissante crinière, qui le protège pendant les combats, qui a une couleur très claire, qui est moins volumineuse chez les jeunes, et qui va visiblement en s’assombrissant jusqu’à devenir brun-marron chez les individus sexuellement matures, pour des raisons endocrines et environnementales, comme il a été dit dans la fiche des Felidae. Le tigre ne possède ni pinceau ni crinière touffue, déjà fortement réduite chez le lion indien.

La crinière est très réduite, n’existant qu’entre les oreilles et les côtés de la gorge, sauf chez certaines sous-espèces, comme le tigre du Bengale, chez qui l’on peut réellement parler de crinière, bien qu’évidemment très modeste par rapport à celle du lion d’Afrique. Mais ce qui saute tout de suite à l’œil est la différence de livrée. Celle du tigre est plus complexe. Elle a une teinte de fond qui va du blanchâtre au brun roux, mais qui dans la majeure partie des cas est brun jaunâtre plus vif sur le dessus et plus clair sur les flancs, alors que les parties inférieures, ventre et gorge, sont blanches. Sur cette livrée, se superposent irrégulièrement des bandes noirâtres qui partent du dos, parcourant les flancs légèrement à l’intérieur. D’autres rayures noires, moins nombreuses et non continues, parcourent transversalement le ventre, les pattes postérieures et la queue, alors que les pattes avant ne sont pas rayées sur le côté externe. La teinte de fond est présente sur le museau, seulement limitée au niveau du front (chez le tigre du Bengale, elle est plus foncée), du septum nasal, et des zygomatiques.

L’arcade sourcilière supérieure, les joues, les lèvres et le menton sont blancs. Les rayures noires du museau sont plutôt irrégulières, disposées approximativement de façon à encadrer la face. La “truffe” (ou partie glabre apicale du nez) est rouge. Les oreilles sont blanches (évidemment, chez les individus leucistes, tout le manteau est blanc clair, avec les oreilles bordées de noirs continuant les rayures irrégulières noires) sur la surface interne ; les biologistes pensent qu’une telle différence de couleur sert comme “signal visuel” pour les autres membres de la même espèce.

L’élégante livrée à bandes noires mime parfaitement les jeux de lumières dans la jungle ou dans les cannaies © G. Mazza

L’élégante livrée à bandes noires mime parfaitement les jeux de lumières dans la jungle ou dans les cannaies © G. Mazza

Il semble que lorsque le tigre (aussi bien mâle que femelle) a l’intention d’attaquer, les oreilles bougent de façon à ce que la tache blanche soit plus visible de face, pour signaler au rival (par exemple pendant qu’il courtise une femelle, ou pour défendre une proie à peine tuée, ou la progéniture) sa propre détermination.

Quand, au contraire, le tigre reste sur la défensive, il feule les oreilles aplaties.

Inversement, quelques biologistes anglais auraient démontré que chez les lions (aussi bien mâle que femelle), les oreilles baissées montrent la détermination à attaquer et à frapper.

A propos des tigres blancs, que l’on trouve dans différents parcs animaliers, ils ne sont, contrairement à ce que l’on croit, ni albinos, ni atteints de leucisme comme les lions blancs dont on a parlé dans l’introduction des Felidae. Ce que l’on appelle communément un tigre albinos est en fait un typique cas de pollution génétique : c’est un hybride qui présente un pool génétique provenant pour 90 % du tigre de Sibérie et pour 10 % du tigre du Bengale, suite à des erreurs de croisements réalisés en captivité durant les années 70. Ces tigres ont une grande tête et un pelage blanc, comme celui du tigre de Sibérie, mais la longueur du poil et les dimensions de l’animal sont équivalentes à celles du tigre du Bengale.

Il ne s’agit donc pas d’une sous-espèce nouvelle, ni d’une mutation phénotypique récessive (typique de l’albinisme), ni d’un phénomène dû à un gène hétérozygote récessif (à la base du leucisme), mais d’un hybride créé par erreur et inconsciemment relâché en liberté dans la région du Bengale, contre la volonté des conservateurs biologistes des parcs naturels in situ, ce qui a affaibli la lignée pur sang de la sous-espèce bengalie, contribuant au processus d’extinction et l’accélérant.

Quand un tigre tourne ses oreilles en montrant ainsi ses taches blanches, il est prêt à attaquer © Giuseppe Mazza

Quand un tigre tourne ses oreilles en montrant ainsi ses taches blanches, il est prêt à attaquer © Giuseppe Mazza

Ethologie-Biologie reproductive

Les tigres, contrairement aux lions qui ont leur propre harem, sont des animaux solitaires. Ils se réunissent en couple pour de courtes périodes, durant la cour et la période d’accouplement proprement dite.

Il semble que, au moins dans les régions chaudes, il n’existe pas de saison des amours bien définie et rythmée par les saisons, comme cela est le cas dans les régions tempérées, vu que les petits naissent tout au long de l’année.

La gestation dure environ trois mois et demi, et les petits naissent en nombre variant de 1 à 5 par portée.

Mais quand la portée est trop nombreuse, la mère, incapable de s’occuper de plus de deux ou trois tigreaux à la fois, est obligée de dévorer les petits en trop !

Les petits sont allaités durant le premier mois, voire un mois et demi, après lequel la mère cesse de les allaiter, en commençant à les nourrir avec la viande des proies tuées.

A partir de deux mois environ, les tigreaux suivent la mère durant les parties de chasse, sans toutefois y prendre part activement. C’est seulement après quelques mois que la femelle capture une proie sans la tuer, laissant ensuite cette prise à sa progéniture afin qu’elle apprenne. A environ un an, les jeunes tigres sont assez indépendants et abandonnent leur mère pour commencer leur vie solitaire.

Comme vu dans la fiche des félins, chaque tigre prend possession d’un territoire de chasse, qui s’étend en moyenne sur 10 kilomètres carrés. Pour avertir les autres tigres de sa présence et souveraineté, il marque les frontières de son territoire avec des traces odorantes, généralement urinaires, et avec des signaux visuels et acoustiques, comme des troncs griffés et des rugissements. Ces signaux sont généralement suffisants pour éloigner des étrangers de la même espèce, même si leur présence est tolérée pendant de brève période.

Les tigres blancs des zoos ne sont pas des albinos mais des hybrides de tigres de Sibérie et du Bengale © G. Mazza

Les tigres blancs des zoos ne sont pas des albinos mais des hybrides de tigres de Sibérie et du Bengale © G. Mazza

Il a été montré que bien que se soient des animaux solitaires, les tigres ne montrent pas beaucoup de signes d’agressivité envers leurs semblables même s’ils partagent rarement un repas.

Contrairement au lion d’Afrique, qui est le roi des espaces ouverts de la savane, le tigre préfère comme demeure les fouillis des bosquets tropicaux ou des zones humides, environnements dans lesquels sa remarquable livrée devient un parfait camouflage pour sa grande carrure. Cependant, il ne dédaigne pas les zones habitées ou construites, tant que l’environnement est à son goût.

En Inde, il choisit comme position pour ses opérations, les ruines de quelque temple, où il passe, somnolent, les heures chaudes de la journée, puisqu’il est beaucoup plus actif durant la nuit ou à l’aube.

Le tigre chasse durant les heures nocturnes ou durant les premières heures du matin. Aidé par sa vue et son odorat bien développés, et de son ouïe très fine, il se poste en silence près des points d’eau à l’heure où les herbivores viennent se désaltérer, prêt à bondir comme la foudre sur la proie désignée. Parmi ses victimes préférées, il y a les sangliers, les cochons sauvages, les Antilopes cervicapres (Antilope Cervicapra), les cerfs et le grand Nilgaut (Boselaphus tragocamelus). Seuls les individus les plus forts s’attaquent aussi au buffle d’eau (Bubalo bubalis).

Durant la chasse, l’action du tigre est moins puissante que celle du lion. Alors que ce dernier, après avoir sauté sur le dos d’une proie plus grande, la tue pendant la course, lui brisant l’épine dorsale d’un coup de patte mortel, le tigre, incapable d’une telle prouesse, l’achève à terre brisant d’une morsure les vertèbres cervicales des plus petites proies et étranglant les plus grosses, mises à terre avec l’impact des membres antérieurs, par une morsure prolongée qui contraint la jugulaire. Une fois qu’il a tué sa proie, le tigre ne la dévore pas entièrement sur place, mais la traîne dans les broussailles des bosquets, pour ne pas être perturbé pendant qu’il mange.

Le tigre blanc, qui a aussi des bandes, avec la tête du sibérien, est une évidente dérive génétique © Giuseppe Mazza

Le tigre blanc, qui a aussi des bandes, avec la tête du sibérien, est une évidente dérive génétique © Giuseppe Mazza

Il semblerait que, pendant un seul repas, le tigre soit capable d’ingurgiter environ 20 kg de viande ! Ce qui reste, bien caché, s’il n’est pas volé par un Léopard (Panthera pardus), sera mangé plus tard.

Comme expliqué précédemment, le tigre évite avec soin les éléphants d’Asie, qui sont d’ailleurs à présent très rares à l’état sauvage, ainsi que les rhinocéros, et n’interfère pas dans l’activité prédatrice de l’autre grand carnivore asiatique, le léopard.

Un ennemi non moins redoutable pour les tigres indiens, est le Chien sauvage d’Asie, aussi appelé Dhole (Cuon alpinus), qui rôdent en larges et agressives bandes composées de 20 individus et même plus.
S’ils attaquent un tigre robuste, celui-ci réussit au maximum à en tuer 6-7 mais à peu d’espoir de survie s’il ne prend pas la fuite.

Le tigre de Sibérie (Panthera tigris longipilis), pour s’adapter aux rudes climats de la Sibérie et de la Mongolie, a développé comme adaptation écologique un manteau beaucoup plus long avec une coloration claire imitant la neige. Il est plus grand que ses congénères méridionaux, mais figure aussi parmi les tigres ayant l’un des plus forts risques d’extinction. Le tigre du Bengale (Panthera tigris tigris) est présent aussi en Indochine et en Chine méridionale, mais n’est pas présent à Ceylan. Ce tigre est aussi, malgré une vaste aire de répartition, fortement en danger.

En dernier, le tigre de Java (Panthera tigris sondaica) est limité à Sumatra et à Java. Alors que sur l’île de Java, fortement anthropisée, il risque l’extinction, à Sumatra, avec des habitations éparses par rapport à la superficie (ce sont principalement des populations tribales qui vivent dans des villages ruraux), il est encore relativement abondant et plus commun que sur le continent.

D’autre sous-espèces de tigres très rares sont le Tigre de Corée, aussi appelé Tigre de l’Amour (Panthera tigris coreenensis), répandu de la Mongolie à la Corée, et le Tigre de la Caspienne (Panthera tigris virgata), désormais quasi éteint et vivant en Iran.