Boiga dendrophila

Famille : Colubridae

GIANNI-2.gif
Texte © Dr. Gianni Olivo

 

michel.gif
Traduction en français par Michel Olivié

 

Boiga dendrophila, Colubridae, Serpe delle mangrovie

La Boiga dendrophila est un colubridé venimeux asiatique long jusqu’à 2 m et associé aux arbres et à l’eau © Giuseppe Mazza

Avec le Serpent des mangroves (Boiga dendrophila Boie, 1827), connu sous le nom de Gold-ringed cat snake ou Mangrove snake en anglais, de Mangroven Nachtbaumnatter ou Ularburong en allemand, de Serpiente del manglar en espagnol, de Serpe delle mangrovie en italien, d’Ularburong en Bahasa melayu et d’Ulartiung cincin emas en malais on a ici affaire, comme cela avait été dit dans le cas du Mussurana et des Ahaethulla, d’un autre serpent appartenant à la famille des colubridés (Colubridae) et possédant un appareil venimeux de type opistoglyphe et qui, contrairement à la réputation d’innocuité qu’ont les couleuvres, n’est pas totalement inoffensif.

La Boiga dendrophila est un gros serpent asiatique qui peut aisément dépasser 2 mètres, avec des maximums de 2,5 m, et qu’il est très difficile de confondre avec d’autres reptiles, même pour un profane.

Ses dimensions, son corps robuste, mais en même temps gracieux, et comprimé latéralement, ses couleurs éclatantes où le noir ou le bleu contraste avec un jaune or brillant, sa tête large et aplatie,  ses yeux dotés d’une pupille elliptique verticale qui lui a valu l’appellation de serpent-chat, son agressivité et la détermination avec laquelle il fait face à un gêneur potentiel en n’hésitant pas à mordre avec frénésie et de façon violente en font un animal qui inspire le respect et, chez beaucoup, la peur. Disons de suite qu’en réalité il existe au moins neuf sous-espèces de ce colubridé typique du Sud-Est asiatique et dont l’aire de répartition s’étend de l’Inde au Vietnam et au Sud jusqu’au-delà des Philippines et aux îles de l’Indonésie :

Boiga dendrophila melanota : représenté ici il est commun dans l’Est de la Malaisie, la partie Sud de la Thaïlande, en Indonésie et à Singapour.

Boiga dendrophila dendrophila : Java

Boiga dendrophila annectens : Indonésie, y compris Bornéo, sultanat de Brunéi et Est de la Malaisie

Boiga dendrophila divergens : Philippines (îles de Polillo et Luçon). Sa couleur de fond tend souvent vers le bleu électrique. Ses bandes jaunes sont fines et nombreuses, régulièrement espacées et délimitées chacune par deux fines rayures foncées.

Boiga dendrophila gemmicincta : Indonésie, y compris Célèbes. L’adulte est totalement noir alors que les individus jeunes présentent de fines rayures transversales de couleur jaune.

Boiga dendrophila latifasciata : Mindanao. Ici les bandes jaunes sont larges, souvent en forme de sablier, et délimitent entre elles des espaces noirs qui peuvent être ovales ou arrondis. De plus les bandes jaunes sont tachetées de noir, un effet créé par l’apparition de la peau foncée au milieu des écailles de couleur or.

Boiga dendrophila, Colubridae, Serpe delle mangrovie

Elle chasse la nuit des mammifères, des oiseaux, des amphibiens et même des poissons. C’est un serpent opistoglyphe avec des dents vénéneuses au fond de la bouche et aussi un puissant serpent constricteur © Giuseppe Mazza

Boiga dendrophila levitoni : Panay.

Boiga dendrophila multicincta : Philippines (Balabac et Palawan).

Boiga dendrophila occidentalis : îles de l’Indonésie, archipel de Batu, Babi et Sumatra.

Parmi l’ensemble des différentes sous-espèces il existe ensuite des variantes : des individus albinos peuvent avoir une couleur saumonée claire à la place du noir. Certains individus peuvent avoir des bandes blanches au lieu de jaunes. Sur une photo que j”ai vue autrefois un individu présentait à la place du jaune une couleur rouge brique foncée.

L’habitat qu’ils préfèrent est un habitat humide et, comme le laisse entendre leur nom, les forêts de mangroves sont un de leurs milieux favoris mais ces reptiles vivent aussi dans la forêt pluviale, toujours à proximité de l’eau, dans les marécages et les prairies flottantes à condition qu’il y ait des arbustes ou des plantes affleurantes. Ils ne dédaignent pas parfois des plantations et des parcs où l’élément liquide est présent.

Ce sont des animaux nocturnes, comme en témoigne leur oeil à la pupille verticale, qui passent une grande partie de leur temps sur des branches (Dendrophila = qui aime les arbres) mais ils descendent à terre, la nuit, pour chasser.

Leurs proies, qui peuvent avoir des dimensions importantes étant donné à la fois la taille de ce serpent et la très large ouverture de sa gueule, sont capturées au moyen d’une détente foudroyante de la tête, la gorge grande ouverte, puis retenues fermement par les dents qui sont crochues et tournées vers l’arrière.

Comme il est un opistoglyphe et que ses crochets venimeux sont placés en arrière sous le palais et en partie seulement cannelés ce prédateur doit “mordiller” sa proie pour permettre au venin de pénétrer dans les blessures. Bien que son venin soit suffisamment puissant pour tuer rapidement une grande partie de ses proies habituelles le serpent des mangroves est aussi un puissant serpent constricteur. Des mammifères, des batraciens, des reptiles et des oiseaux constituent ses proies coutumières mais on a aussi observé la capture de poissons et même de chauves-souris attrapées sur les plantes par surprise. Assez souvent aussi il avale des oeufs d’oiseaux.

En ce qui concerne le venin de ce serpent, eh bien, la situation est la même : les livres le décrivent  comme étant “bénin” et le fait est que je n’ai pas connaissance de cas mortels chez l’homme. Néanmoins, à mon modeste avis, c’est un serpent qu’il faut approcher avec prudence. Les cas d’empoisonnements accompagnés de nécroses cutanées et de manifestations hémorragiques ne sont pas rares.

Peut-on être sûr à 100 % que pour un sujet souffrant d’une maladie cardiaque ou d’une diathèse hémorragique ou pour un enfant son venin ne puisse pas être mortel ? Je n’en jurerais pas. Ceci sans compter évidemment le risque d’une allergie mais on court aussi ce risque avec une piqûre de guêpe et il n’est pas seul lié à la puissance du venin.

Le venin de la Boiga dendrophila contient, entre autres, des toxines appelées les “toxines à trois doigts”, des micro-protéines à finalités multiples. Ce sont des protéines de type non enzymatique qui sont présentes dans les venins de nombreux serpents et qui peuvent présenter une vaste gamme d’effets sur l’organisme humain : comme elles ont aussi pour cible différents types de canaux ioniques elles peuvent avoir des effets neurotoxiques et il n’est pas exclu que cela puisse être valable  aussi pour le venin des Boiga dendrophila. En outre le venin du serpent des mangroves contient des métallo-protéases et des principes cytotoxiques qui provoquent des oedèmes et ont une action sur la coagulation. Un cocktail pas du tout rassurant.

La reproduction est ovipare. La femelle pond  de 4 à 15 oeufs qui éclosent au bout de 3 à 4 mois. Les nouveau-nés mesurent de 24 à 40 cm de long.

 

→ Pour des notions générales sur les Serpentes voir ici.

→ Pour apprécier la biodiversité au sein des SERPENTS cliquez ici.