Aythya nyroca

Famille : Anatidae

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Texte © Dr Davide Guadagnini

 

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Traduction en français par Catherine Collin

 

Les mâles d'Aythya nyroca se reconnaissent immédiatement grâce à l'iris blanc-jaunâtre de leur œil © G. Mazza

Les mâles d'Aythya nyroca se reconnaissent immédiatement grâce à l'iris blanc-jaunâtre de leur œil © G. Mazza

Le Fuligule nyroca (Aythya nyroca Guldenstadt 1770) est un canard qui appartient à l’ordre des Ansériformes (Anseriformes), à la famille des Anatidés (Anatidae), au genre Aythya et à l’espèce Aythya nyroca. Espèce monotypique.

Le nom de genre Aythya vient du grec ancien “aithuia” qui pourrait faire référence à un canard de mer ou au pingouin. Le nom de l’espèce nyroca vient du russe “nyrok” qui signifie canard.

Zoogéographie

Il est présent au niveau des régions tempérées de la zone paléarctique centrale et occidentale : de l’Europe occidentale à la Chine occidentale, en Mongolie occidentale et dans le nord de l’Iran ainsi qu’en Lituanie.

Le nombre d’individus de cette espèce et sa dispersion varient en fonction des conditions des aires de reproduction. L’aire de répartition apparaît particulièrement fragmentée et instable dans les marges occidentales. En Italie, sa population est restreinte à quelques couples présumés nicheurs en Frioul-Vénétie Julienne, Émilie-Romagne, Toscane, Latium, Pouilles et Sardaigne. C’est une espèce migratrice dont une partie de la population est partiellement sédentaire dans les zones les plus méridionales de son aire de répartition.

Les lieux de nidification les plus septentrionaux sont abandonnés entre septembre et octobre. Dans les quartiers d’hivernage, on note déjà les premières arrivées fin octobre et elles s’étendent sur tout le mois de novembre. Les départs ont lieu entre mars et avril, avec des individus qui ne nidifieront probablement pas se déplaçant jusqu’en mai. Les principaux quartiers d’hivernage se situent dans la zone Méditerranée-Mer Noire et en Afrique occidentale. En Europe centrale l’hivernage semble épars et localisé.

La femelle a des couleurs moins vives et l'iris de son œil est brun © Giuseppe Mazza

La femelle a des couleurs moins vives et l'iris de son œil est brun © Giuseppe Mazza

Le nombre de canards hivernants est faible, ce qui, joint aux habitudes discrètes de cette espèce, rend le recensement compliqué.

Les pays qui accueillent les contingents les plus importants de fuligules nyroca hivernants sont l’Égypte, la Roumanie, le Soudan, les pays de l’ex-Yougoslavie, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, l’Azerbaïdjan (qui accueillent chacun des milliers d’individus), la Russie occidentale, le Bangladesh, la Mongolie, le Turkménistan, le Mali (qui accueille également chacun des milliers d’individus).

Les individus hivernant en Italie sont assez épars.

On estime la population qui y niche à 14000-21000 couples et la population totale à 40000-70000 individus.

Malheureusement, son aire de répartition se réduit constamment et certains des lieux où on le rencontrait par le passé ont totalement disparus. Ceci est alarmant car en 1900 l’espèce était décrite comme l’une des espèces de canard les plus abondantes.

Écologie-Habitat

En période de reproduction il fréquente les zones marécageuses d’eau douce, de profondeurs moyennes et riches de végétation palustre aussi bien immergée que flottante ou émergente. Il privilégie les plans d’eau stagnante sur les rives desquels poussent d’épaisses ceintures de carex et de roseaux mélangés à des arbres et arbustes dispersés. Au besoin, il accepte des eaux faiblement saumâtres comme des étangs côtiers et des lagunes.

Il nage plutôt surélevé sur l'eau mettant en évidence le blanc de ses plumes sous-caudales © Giuseppe Mazza

Il nage plutôt surélevé sur l'eau mettant en évidence le blanc de ses plumes sous-caudales © Giuseppe Mazza

Les lieux de nidification habituels se trouvent généralement au niveau de la mer. Dans les zones d’eaux fermées, au contraire, sa présence est occasionnelle. Il ne fréquente pas les lieux d’altitude supérieure à 1 000 mètres.

En dehors de la période de reproduction il fréquente des étendues d’eau douce naturelles et artificielles, des lagunes, des étangs saumâtres et, plus rarement, des eaux marines côtières. Il évite généralement les eaux profondes et oligotrophes, les zones humides caractérisées par de fréquentes variations de niveau et les cours d’eau à fort courant.

Morpho-physiologie

Il s’agit d’une espèce monotypique aux mesures modestes et compactes (c’est le plus petit des fuligules). Il a une longueur de 38-42 cm, une envergure de 63-67 cm et un poids de 410-685g (les mâles sont légèrement plus lourds). Les deux sexes se distinguent assez facilement bien que n’ayant pas de différences très marquées.

Chez le mâle la tête, le cou et la poitrine sont brun-marron et les flancs fauves. Les parties supérieures ont aussi une tonalité avec des reflets acajou brillant-châtaigne pourpre-violacé (il est également connu comme “canard caramel”).

Les couvertures supérieures des ailes, les sus-caudales et les rectrices sont brun-sombre. Les ailes ont des nuances vert terne avec un large miroir alaire blanc-brillant très visible en vol (de plus grande dimension par rapport au fuligule morillon).

Pour la reproduction des couples monogames saisonniers se forment © Giuseppe Mazza

Pour la reproduction des couples monogames saisonniers se forment © Giuseppe Mazza

Le dessous de la queue est blanc et le ventre est blanc brillant avec des nuances plus grises vers les sous-caudales, ces parties, assemblées au-dessous de l’aile, toujours claire, sont très visibles quand l’oiseau est en vol. Une petite tache blanc-fauve est présente sur le menton et un collier brun sombre se trouve à la base du cou.

Le bec, assez long, (37,5-43 mm), est gris ardoise avec les extrémités et les bords plus clairs. Il a un front haut assez caractéristique, avec une sorte de “petite couronne relevée” sur le sommet de la tête.

Les pattes sont de couleur gris-olivâtre avec une membrane noire. Le tarse mesure environ de 29 à 36,5 mm. L’iris est blanc-jaune très clair.

Chez la femelle la couleur générale du plumage est plus brune et plus terne par rapport au mâle. Les joues sont fauves et la couleur du cou est dans un dégradé de tons rouge-brun-terne sur la partie inférieure et sur la poitrine. Les parties supérieures sont semblables à celles du mâle. Le bec est de couleur noirâtre-mat avec les bords et le sommet gris. Les pattes sont semblables à celles du mâle mais en plus mat.

L’iris est brun. La couleur de l’œil est nettement différente entre le mâle et la femelle et permet de différencier les deux sexes toute l’année (y compris avec le plumage d’éclipse). Durant cette période le mâle tend à ressembler à la femelle mais a la tête et la poitrine plus roussâtres et des tons plus clairs sur le dos, le cou et les joues. La brillance et le blanc de l’iris et du dessous de la queue restent pareils. La femelle, en cette période est plus claire.

Les jeunes ressemblent à la femelle mais leur livrée est plus uniforme sur les parties supérieures. La tête, le cou et la poitrine sont marron foncé avec des tons roussâtres à peine soulignés. Le ventre est tacheté de blanc et de marron, le dessous de la queue est marbré moucheté de brun. Le bec du jeune est gris-bleuâtre à gris-noir avec la base plus claire. Les pâtes sont gris-bleuâtre avec des palmes noires mates. L’iris est gris-brun ; au cours du premier hiver il devient brun chez la femelle et gris clair chez le mâle.

C’est un canard de petites dimensions, au vol rapide qui s’envole facilement après une brève course sur l’eau. En vol, le blanc brillant du large miroir alaire et du dessous de la queue sont particulièrement bien visibles.

Des cas d’hybridation avec des espèces appartenant aux genres Aythya, Anas et Netta ont été enregistrés.

Deux canes suivies par un mâle. Ils se nourrissent de végétaux et de petits animaux aquatiques © Giuseppe Mazza

Deux canes suivies par un mâle. Ils se nourrissent de végétaux et de petits animaux aquatiques © Giuseppe Mazza

Éthologie-Biologie reproductive

C’est une espèce peu grégaire et généralement silencieuse en dehors de la période de reproduction ; les vocalises de la femelle sont plus fortes et plus rudes que celles du mâle.

Il nage plutôt haut sur l’eau avec la queue légèrement remontée, ce qui met en évidence le blanc des sous-caudales.

Le fuligule nyroca est fortement aquatique et aime se tenir dans des eaux peu profondes où il nage et plonge avec agilité à la recherche de nourriture. Il est particulièrement actif au crépuscule et se nourrit aussi de nuit.

Aythya nyroca se nourrit surtout de graines et de différentes parties de plantes aquatiques (Potamogeton, Carex, Ceratophyllum, Chara, Lemma, etc.) qu’il recueille en s’immergeant partiellement ou totalement ou bien en nageant en surface dans des endroits profonds généralement de 20-70 cm. Il se nourrit aussi de petits animaux comme des petits poissons, des amphibiens, des annélides, des mollusques, des crustacés et des insectes, tous trouvés en milieu aquatique.

Il vit isolé, en couple ou en petits groupes inférieurs à une dizaine d’individus. Il a un tempérament réservé, il ne tend pas à se mêler aux autres espèces de canards. En période hivernale, il peut devenir provisoirement grégaire, pouvant se réunir en volées comprenant de grandes concentrations d’individus dans des lieux favorables. Cette espèce forme durant la période de reproduction des couples monogames saisonniers. Les fuligules nyroca construisent des nids isolés au milieu de la végétation palustre en croissance sur un substrat consolidé ou dans l’eau. Le nid est une structure basse constituée de fragments de roseaux, de feuilles et d’herbes, recouverts de duvet.

Les vocalises de la cane sont plus bruyantes et plus rudes que celles du mâle © Giuseppe Mazza

Les vocalises de la cane sont plus bruyantes et plus rudes que celles du mâle © Giuseppe Mazza

Quand ils ne sont pas posés directement sur des amas de végétation palustre, les nids sont placés sur de petites îles, très proches de l’eau. Les premières pontes ont lieu pendant les dix derniers jours d’avril avec des retards pouvant aller jusqu’à la première semaine de juin.

La couvée est constituée en moyenne de 8-10 œufs (6-14) de forme ovale courte, de couleur crème-gris-verdâtre. Les œufs sont de dimensions moyennes : 53 x 38 mm (48-60 x 35-43) pour un poids moyen de 36 g (31-41). Si la couvée se trouve perdue, elle peut éventuellement être remplacée.

C’est à la femelle que revient le soin de couver les œufs. L’incubation dure 25-27 jours. Les canetons sont nidifuges et sont aptes à nager sous l’eau dès leur sortie de la coquille, se déplaçant rapidement sous l’eau pour fuir les éventuels prédateurs.

Les canetons sont globalement plutôt sombres (marron fumé) : ils ont le haut, la partie arrière du cou et le reste des parties supérieures gris-brun sombre. Ces teintes sombres sont accentuées sur le bas du dos. Ils ont des filoplumes (petites plumes ressemblant à un poil très fin et terminées par quelques barbes en touffe) allongées sur le dos et la tête, colorées au sommet en jaune-olive. Ils présentent des marbrures jaunes sur les ailes et sur les côtés du dos. La gorge, le cou et la partie centrale du ventre sont jaunes pâles. La ramphothèque supérieure est brun-olive foncé et l’inférieure couleur chair claire. Les pattes sont noirâtres avec des marques jaune-olive. L’iris est brun. Les jeunes sont en mesure de voler vers 55-60 jours, la maturité sexuelle est atteinte à un an.

L’espèce est menacée par la perte de son habitat, le changement climatique qui a augmenté la sécheresse, la chasse, la pollution, l’empoisonnement au plomb, la noyade après avoir été piégée dans des filets de pêche, l’introduction d’espèces étrangères, les nuisances humaines. Concernant cette espèce, des plans de sauvegarde locale et internationale sont mis en place par les pays accueillant cette espèce.

Synonymes

Fuligula nyroca, Fulix nyroca, Nyroca nyroca.

 

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