Bufotes viridis

Famille : Bufonidae


Texte © Dr. Edoardo Di Russo

 

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Traduction en français par Michel Olivié

 

Bufotes viridis, Bufonidae, Crapaud vert

Le Crapaud vert (Bufotes viridis) a une aire très vaste qui couvre toute l’Europe continentale de l’Espagne et la zone Nord-Est de l’Italie jusqu’à la Russie puis l’Asie du Kazakhstan à l’Est de la Sibérie jusqu’à l’Amérique du Nord © Giuseppe Mazza

Le Crapaud vert (Bufotes viridis Laurenti, 1768) appartient à la classe des Amphibia, les vertébrés qui passent au moins une partie du cycle de leur existence dans le monde aquatique, à l’ordre des Anura, les amphibies dépourvus de queue et à la famille des Bufonidae.

Cette espèce est répertoriée dans l’Appendice II “Espèces strictement protégées” de la Convention de Berne de 1979 pour la conservation de la vie sauvage et des biotopes en Europe et dans l’Annexe IV de la Directive Habitat (Directive 92/43/CEE).  L’UICN Red List ainsi que son Comité italien attribuent à cette espèce le statut de “Risque minimal” (Least Concern LC).

Le nom du genre Bufotes est une variante du genre Bufo, sa place taxonomique à l’intérieur de la famille des Bufonidae n’ayant pas en effet été jusqu’à présent encore bien définie, et dérive du latin vulgaire “bufo”, lui-même issu du grec “βάτραχος” (vátrachos) = batracien, un terme par lequel on désignait les amphibiens dans certaines anciennes classifications zoologiques, et en particulier les anoures communément connus sous les noms de grenouilles et de crapauds.

Le nom de l’espèce viridis = vert rappelle, en latin également, sa couleur caractéristique enrichie de taches vert émeraude.

Zoogéographie

Le Crapaud vert a une aire de distribution qui couvre toute l’Europe continentale de l’Espagne à la Russie et l’Asie du Kazakhstan à l’Est de la Sibérie et jusqu’à l’Amérique du Nord.

En Italie sa présence se limite au Nord-Est (Frioul-Vénétie julienne). Dans le reste de la péninsule il existe le Crapaud vert italien (Bufotes balearicus) dont il se distingue seulement sur le plan génétique.

Écologie-Habitat

Le Bufotes viridis est une des espèces de la région paléarctique dont la capacité d’adaptation est la meilleure et on peut par conséquent le trouver dans différents types d’habitat. Les forêts, les agrosystèmes, les régions montagneuses et les zones semi-désertiques et désertiques sont autant de milieux où l’on peut relever la présence du Crapaud vert. Toutefois, comme il a besoin de milieux humides pendant la saison de reproduction il ne s’éloigne jamais trop des points d’eau tels que des sources, des étangs, des fossés , des fleuves ou des lacs.

Pour faire éclore ses oeufs et faire grandir ses larves il tire profit d’eaux dormantes ou au faible courant et peu profondes. On le rencontre aussi dans des milieux anthropisés comme des jardins et des potagers. Il n’a pas d’exigence particulière en ce qui concerne la qualité de l’eau et supporte même un certain niveau de pollution et de salinité. De plus sa tolérance thermique atteint 40 °C et pendant l’hiver il survit à de basses températures en entrant en hibernation dans des abris ou en s’enfouissant dans la boue.

Morphophysiologie

Il a une corpulence robuste bien qu’il soit légèrement moins trapu et moins imposant que le Bufo bufo. Il atteint au maximum 10 cm. Cependant les glandes parotoïdes qu’il possède sur le cou sont proportionnellement plus allongées.

Bufotes viridis, Bufonidae, Crapaud vert

Plus petit que le Bufo bufo et doté d’une élégante livrée aux taches vert émeraude il n’atteint que 10 cm mais les glandes parotoïdes sont en proportion plus allongées © Giuseppe Mazza

Sa couleur varie du marron au blanc mais il doit son nom à sa livrée qui présente des taches vert émeraude très apparentes et nettement délimitées par des lignes foncées où s’insèrent de nombreux petits points rouges. Le ventre est dépourvu de taches vertes et est d’habitude blanchâtre avec au mieux des taches foncées. Il a un museau arrondi et de gros yeux jaune doré dotés d’une pupille horizontale.

Les mâles ont un sac vocal externe qui pendant la saison de reproduction a une couleur bleuâtre au-dessous de la gorge.

Les membres antérieurs sont très robustes. La palmure des pattes est très large. Le premier doigt interne de la main est pourvu d’une callosité servant pour la reproduction. Le dimorphisme sexuel se manifeste principalement par la livrée verte plus vive des femelles et leur plus grande taille.

Éthologie-Biologie reproductive

Le Crapaud vert est surtout actif au moment du crépuscule et pendant la nuit et passe le jour caché dans des abris afin de conserver son humidité. Si les conditions d’humidité le permettent il est également actif le jour.

Cette espèce adopte différentes sortes de régimes et de stratégies alimentaires suivant son stade de développement et sa taille. Les larves (aussi appelées têtards) se nourrissent d’algues, de débris organiques et de plancton, principalement des rotifères et des micro-crustacés. Les juvéniles métamorphosés et immatures capturent de petits invertébrés tels que des collemboles, des diptères, des acariens et des coléoptères. Les adultes du Crapaud vert se nourrissent essentiellement d’arachnides, d’insectes et de mollusques. Un pourcentage important de leur régime est constitué par les fourmis. Leur méthode de chasse est qualifiée de “sit and wait” (s’asseoir et attendre) et consiste à rester immobile jusqu’à ce que la proie soit suffisamment proche pour pouvoir être attrapée avec la langue.

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Les mâles atteignent les frayères les premiers. À la période de reproduction ils ont tendance à se rassembler et à chanter en groupes nombreux pour attirer les femelles © Jean-Pierre Vacher

Quand le Bufotes viridis se sent menacé il sécrète à partir de ses glandes parotoïdes un liquide toxique dont l’odeur incommode le prédateur mais parfois il peut aussi émettre des “cris” de défense.

Les principaux prédateurs des crapauds adultes sont deux serpents, la Natrix natrix et la Natrix maura,  mais le danger provient aussi des rapaces aussi bien diurnes que nocturnes, des oiseaux échassiers et de certains mustélidés. Les têtards comme les œufs sont mangés par des larves d’odonates, des scorpions d’eau, des larves d’amphibiens urodèles et des crustacés comme le Procambarus clarkii.

La période de reproduction débute à une date qui dépend de la latitude et de la température mais en général elle survient vers le mois de mars et dure quelques mois. Les populations utilisent chaque année le même site pour la ponte appelé zone de frayère. Il s’agit de points d’eau peu profonds, temporaires ou permanents. Cela permet également d’effectuer le suivi du déclin ou de l’extinction de populations dans le cas où l’on n’enregistrerait plus de naissances sur le site. Pour rejoindre les frayères ils effectuent de véritables migrations sur une distance qui peut parfois atteindre 5 km. Pendant cette période les individus ne s’alimentent pas.

Les mâles sont le premiers à rejoindre les frayères et sont en plus grand nombre que les femelles. La  conquête d’une compagne donnent souvent lieu à des affrontements.

Le Crapaud vert a recours à deux solutions pour le choix du partenaire lors de l’accouplement : un choix résolu de la femelle pour les mâles qui rivalisent entre eux et un choix résolu du mâle pour la femelle. Le Crapaud vert est capable d’émettre un cri d’appel puissant qui peut rappeler celui des criquets. Les mâles pendant la période de reproduction ont tendance à se rassembler et à chanter en formant des groupes nombreux afin d’attirer les femelles.

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L’accouplement est du type axillaire et a lieu dans l’eau. Une femelle peut pondre 2000-3000 œufs disposés sur deux rangs à l’intérieur de cordons gélatineux qui atteignent jusqu’à 7 m. Ils sont fécondés à leur sortie par le mâle qui lui presse les flancs solidement agrippé grâce aux callosités spéciales de ses pattes avant © Jeroen Speybroeck

L’accouplement est du type axillaire et a lieu dans l’eau : le mâle s’agrippe aux aisselles de la femelles grâce aux callosités situées sur ses doigts antérieurs et facilite l’émission des œufs en comprimant les flancs de la femelle. Dès que les œufs sortent ils sont fécondés par le mâle. Pendant un accouplement de 2000 à 3000 œufs sont pondus en moyenne et disposés sur deux rangées à l’intérieur de cordons gélatineux qui peuvent atteindre 7 m. Les cordons sont d’abord enroulés puis accrochés aux plantes ou aux objets immergés ou bien relâchés sur le  fond.

La durée de l’incubation dépend de la température de l’eau mais elle est généralement d’environ 10 jours. Le têtard à sa naissance mesure 4 mm de long et atteint 50 mm avant d’effectuer sa métamorphose. Il a une couleur noire uniforme et des yeux très rapprochés.Sa queue est grande par rapport à son corps et possède une membrane qui se termine par un pointe arrondie. Les têtards se rassemblent le jour vers les bords du plan d’eau pour chercher leur nourriture et se réfugient au fond pendant la nuit. En fonction de la quantité de nourriture disponible et de la température leur développement dure de 2 à 3 mois. Les têtards  effectuent alors leur métamorphose et deviennent des juvéniles immatures qui ressemblent aux adultes.

La maturité sexuelle est atteinte au bout d’un temps qui varie en fonction des latitudes : dans les régions méridionales elle survient aux alentours de l’âge de deux ans mais en remontant elle a lieu plus tard, jusqu’à environ l’âge de cinq ans dans les régions septentrionales. L’espérance de vie moyenne du Bufotes viridis est d’environ 14 ans.

Synonymes

Pseudepidalea viridis (Laurenti, 1768); Bufo viridis Laurenti, 1768.

 

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