Nepenthes vieillardii

Famille : Nepenthaceae


Texte © Prof. Pietro Pavone

 

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Traduction en français par Michel Olivié

 

Endémique de la Nouvelle-Calédonie Nepenthes vieillardii marque la limite Est des plantes carnivores appartenant aux Nepenthaceae

Endémique de la Nouvelle-Calédonie Nepenthes vieillardii marque la limite Est des plantes carnivores appartenant aux Nepenthaceae © Benoît Henry

Nepenthes vieillardii Hook. f. (1873) est une plante carnivore de la famille Nepenthaceae qui est répandue en Nouvelle-Calédonie où on la trouve en plaine, au bord des étangs, dans le maquis-forêt sèche et dans les zones ouvertes jusqu’à 850 m d’altitude.

Son aire de distribution est de toutes les espèces de Nepenthes celle qui est située le plus à l’Est car on la rencontre dans la partie Sud-Ouest de l’océan Pacifique à environ 1500 km à l’Est de la côte australienne.

Les îles de la Nouvelle-Calédonie faisaient partie à l’origine du super-continent du Gondwana et se sont séparées de l’Australie entre le Trias et la fin du Jurassique. Elles sont parties ensuite à la dérive en direction du Nord-Est pour finalement rejoindre leur emplacement actuel aux environs de l’Éocène il y a 50 millions d’années.

Leur isolement a préservé les espèces d’origine et a en même temps favorisé la formation de nombreux endémismes. En effet 79,5 % des plus de 3000 espèces de plantes à fleurs existant sur ces îles sont endémiques.

Détail d'une flamboyante ascidie inférieure. Haute de 4 à 11 cm elle a deux nervures saillantes ou comme ici deux ailes effrangées

Détail d’une flamboyante ascidie inférieure. Haute de 4 à 11 cm elle a deux nervures saillantes ou comme ici deux ailes effrangées © Shadowshador

On suppose que les types originels de Nepenthes vieillardii auraient présenté une tolérance édaphique au sol de serpentine et que grâce à cela leurs descendants auraient pu étendre leur domaine sur un sol ultra-basique riche en oxydes ferreux. Il est probable donc que le substrat de serpentine a facilité l’accroissement de l’aire de Nepenthes vieillardii vu que c’est une plante carnivore qui n’a pas besoin d’extraire l’azote de son substrat.

Le nom du genre provient de l’adjectif du grec ancien “nipenthos” constitué du préfixe négatif “nê” = non et du substantif “penthos” = tristesse, douleur.

Cet adjectif a été employé par Homère pour désigner le breuvage dit “Nepenthes pharmakon” que, selon la légende, Hélène aurait versé en cachette dans le vin que Télémaque, le fils d’Ulysse, et Ménélas, le roi de Sparte et son époux, étaient en train de boire parce que grâce à sa propriété d’effacer les souvenirs il lui était possible d’atténuer la douleur et la nostalgie dues à la séparation du pays natal.

Les ascidies sont rouges ou jaunâtres. Celles du haut, en entonnoir vers l’ouverture, sont en général tubuleuses, un peu resserrées au centre et hautes 4-14 cm. On voit des petites fourmis sur le couvercle et le péristome qui, attirées par des substances sucrées, risquent de tomber sans pouvoir s’échapper dans le petit puits du suc digestif

Les ascidies sont rouges ou jaunâtres. Celles du haut, en entonnoir vers l’ouverture, sont en général tubuleuses, un peu resserrées au centre et hautes 4-14 cm. On voit des petites fourmis sur le couvercle et le péristome qui, attirées par des substances sucrées, risquent de tomber sans pouvoir s’échapper dans le puits du suc digestif © Benoît Henry

Linné, dans son ouvrage “Species plantarum, 1753”, appela Nepenthes distillatoria L. une plante provenant du Sri Lanka car il croyait que la vue après un long voyage de cette merveille de la nature lui aurait fait oublier les fatigues qu’il dut endurer pour la découvrir.

L’épithète de l’espèce vieillardii a été donné à cette plante en l’honneur d’Eugène Vieillard (1819-1896), médecin et botaniste français qui de 1855 à 1857 récolta des plantes à Tahiti avec le jardinier-botaniste Jean Armand Isidore Pancher (1814-1877) et ensuite en Nouvelle-Calédonie où il fut le collègue du naturaliste Émile Deplanche (1824-1874). Rentré en France il fut de 1871 à 1895 le directeur du Jardin botanique de Caen.

Nepenthes vieillardii a des tiges grimpantes qui ont des entre-noeuds qui mesurent 6 cm mais peuvent être très courts. Elles portent des feuilles longues en général de 5 à 20 cm et larges de 1 à 4 cm. Celles du haut sont coriaces et lancéolées alors que celles situées le plus en bas sont oblongues ou spatulées.

La base des feuilles est sessile, large et décurrente en formant deux ailes opposées. Les vrilles sont en général plus longues que les feuilles et ont ou non une boucle.

Les ascidies du bas, quand elles sont différents de celles du haut, ont une forme ovée ou campanulée et sont hautes de 4 à 11 cm. Elles ont 2 nervures saillantes ou 2 ailes effrangées sur toute leur longueur, une ouverture oblique, un péristome, un couvercle et un éperon comme ceux des ascidies du haut mais le bord interne de leur péristome a des dents plus larges que longues.

Les ascidies du haut peuvent avoir une forme variable et se forment progressivement à partir de l’extrémité pendante des vrilles. Elles sont le plus souvent tubuleuses, ventrues en partie basse, un peu resserrées au centre et en forme d’entonnoir en direction de l’ouverture. Elles sont hautes de 4 à 14 cm, larges de 1 à 3 cm et ont une ouverture oblique et un péristome cylindrique ou aplati de 1 à 2,5 cm de large.

Les ascidies peuvent être jaunâtres ou rougeâtres.

L’inflorescence mâle est un racème long de 5 à 25 cm porté par un pédoncule de 2 à 6 cm. Les fleurs n’ont pas de bractées. Celles du bas sont longues de 5 à 10 mm alors que celles du haut sont plus courtes. Les tépales sont orbiculaires, elliptiques et longs de 3 à 5 mm. Les étamines aux filaments soudés en forme de colonne sont longues de 2 à 4 mm, y compris les anthères, et ne dépassent pas le périgone.

L’inflorescence femelle est semblable à l’inflorescence mâle mais elle est plus courte et ses pédicelles floraux sont généralement plus épais. Les tépales sont oblongs à lancéolés. L’ovaire est sessile et porte à maturité un fruit long de 10 à 18 mm. La pollinisation est assurée par des phalènes.

Ces plantes peuvent être recouvertes d’un duvet sur leurs parties jeunes et la face inférieure des feuilles mais parfois seulement sur l’ovaire et les inflorescences.

Nepenthes vieillardii héberge en symbiose dans ses ascidies le moustique Tripteroides caledonicus.

L’inflorescence mâle est un racème long jusqu’à 25 cm. Les fleurs à droite n’ont pas de bractées. Celles du bas sont longues 5-10 mm. Celles du haut sont plus courtes. Les tépales sont orbiculaires, elliptiques et longs 3-5 mm. Les étamines aux filaments soudés en colonne mesurent 2-4 mm, y compris les anthères, et ne dépassent pas le périgone

L’inflorescence mâle est un racème long jusqu’à 25 cm. Les fleurs n’ont pas de bractées. Celles du bas sont longues 5-10 mm. Celles du haut sont plus courtes. Les tépales sont orbiculaires, elliptiques et longs 3-5 mm. Les étamines aux filaments soudés en colonne mesurent 2-4 mm, y compris les anthères, et ne dépassent pas le périgone © Benoît Henry

Inscrite dans la Liste rouge de l’UICN en tant qu’espèce très peu menacée (Least Concern, LC) Nepenthes vieillardii est une espèce qui présente une très grande variabilité an niveau de la morphologie des ascidies, des inflorescences et des fleurs. De fait, au cours du siècle passé, on a recensé différentes espèces et variétés mais en l’état actuel de nos connaissances elles n’ont pas été jugées valides par les botanistes.

Sa culture n’est pas des plus simples vu qu’elle pousse sur des sols constitués de roches ultramafiques. On conseille en tout cas un substrat fait d’un mélange argileux (l’akadama) comme celui que l’on utilise pour la préparation de terreaux destinés aux bonsaïs ou du gravier quartzeux. Il convient de bien laisser sécher le terreau entre deux arrosages.

Synonymes : Nepenthes humilis S.Moore, Nepenthes montrouzierii Dubard, Nepenthes neocaledonica F.Muell. ex Heckel, Nepenthes vieillardii var. deplanchei Dubard, Nepenthes vieillardii var. humilis (S.Moore) Guillaumin, Nepenthes vieillardii var. minima Guillaumin, Nepenthes vieillardii var. montrouzieri (Dubard) Macfarl.

 

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