Clossiana titania

Famille : Nymphalidae

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Texte © Dr. Gianfranco Colombo

 

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Traduction en français par Michel Olivié

 

Clossiana titania, Nymphalidae

Une Clossiana titania à peine sortie de sa chrysalide et dans toute sa splendeur © G. Mazza

Le Nacré porphyrin (Clossiana titania Esper, 1793) appartient à l’ordre des Lepidoptera et à la vaste famille des Nymphalidae.

Comme cela a déjà été indiqué on range habituellement dans cette famille plus de 6.000 espèces de papillons répandus dans le monde entier de sorte qu’elle est considérée comme la plus importante de celles qui regroupent les lépidoptères diurnes.

C’est un papillon qui est très similaire à ceux appartenant aux genres Melitaea, Boloria et Brenthis avec qui il a en commun à la fois la couleur et l’habitat et avec lesquels on peut de ce fait facilement le confondre.

Il apparaît souvent utile à ce sujet de s’en remettre à une classification populaire, ancienne et simple, que les Anglais, qui sont traditionnellement experts dans ce domaine entomologique, ont établie pour distinguer sommairement ces papillons aussi ressemblants.     Ils ont divisé les fritillaires en groupes homogènes en différenciant au moyen de leur taille ou de l’endroit où on les rencontre toutes les espèces européennes appartenant à ces genres,  à savoir les grandes fritillaires : Argynnis paphia, Argynnis aglajaArgynnis adippeArgynnis niobeIssoria lathoniaBrenthis daphne et autres, les fritillaires alpines : Boloria pales, Boloria aquilonaris, Boloria eunomia et autres, les petites fritillaires : Clossiana dia, Clossiana titania, Clossiana selene, Clossiana euphrosyne et autres, les fritillaires des bruyères : Melitaea athalia, Mellicta aurelia, Eurodryas aurinia, Hypodryas cynthia et autres et enfin les mélitées proprement dites : Melitaea cinxia, Melitaea phoebe, Melitaea didymaMelitaea diamina et autres.

Le nacré porphyrin est la plus grande des Clossiana. Cette spécificité est peut-être due à la nécessité de devoir affronter la rudesse des milieux où il vit. Il habite dans des endroits nettement circonscrits et toujours liés à des zones montagneuses ou à des latitudes élevées dont le climat et les conditions environnementales sont de ce fait assez particuliers. Il est probable que cette espèce s’est retirée dans ces endroits isolés après la dernière glaciation en résistant efficacement aux changements de l’environnement.

Les papillons du genre Clossiana pratiquent habituellement un vol énergique caractérisé par des battements d’aile très rapides et très vifs dans lesquels s’intercalent des vols planés très fréquents et de courte durée effectués à vive allure. Leurs dimensions les rapprochent également des Melitaea mais un examen de près révèle la présence sur leurs ailes de motifs assez différents.

Toutes les Clossiana ont sur la face supérieure de gros points nettement soulignés, noirs et ronds et ne présentent presque jamais le quadrillage très caractéristique des Melitaea. La face inférieure de l’aile postérieure joue d’autre part un rôle essentiel dans la subdivision des deux genres : des couleurs différentes et des motifs caractéristiques sont autant de critères spécifiques.

Beaucoup rangent le genre Clossiana dans celui des Boloria, celui-ci demeurant toutefois rangé parmi les noms scientifiques synonymes de cette espèce.

La Clossiana titania est très semblable à la Clossiana dia qui est la seule congénère dont elle partage partiellement l’habitat mais ses dimensions plus grandes et certaines particularités des motifs situés au dos de son aile inférieure facilitent son identification.

Clossiana titania, Nymphalidae

C’est la plus grande de son genre avec 40 à 45 mm d’envergure alaire © Gianfranco Colombo

Le binôme scientifique a une origine moderne en ce qui concerne le genre et une origine mythologique pour ce qui est de l’espèce. Clossiana vient du nom d’un musicologue belge du XIXe siècle à qui Reuss a dédié ce genre de papillon en 1920. Titania est le nom de la fille d’un Titan.

Le nom scientifique Boloria est, quant à lui, lié à une interprétation passablement déformée faite par Moore en 1900. Il vient du grec “bolos” = filet de pêche et désigne le motif réticulé présent sur les ailes, une caractéristique parfaitement inexacte étant donné que , comme on le verra, les ailes portent seulement un nombreuse suite de points et de taches et sont totalement dépourvues de quelque quadrillage que ce soit.

Les pays européens n’ont pas tous donné un nom local à ce papillon dans la mesure où il est inconnu dans beaucoup d’entre eux : Titania en italien, Titania’s Parelmoervlinder en néerlandais, Lehtohopeatapla en suédois, Titania’s Fritillary ou Purple Bog Fritillary en anglais.

Zoogéographie

C’est un papillon strictement paléarctique, assez peu répandu et limité à quelques zones nettement séparées les unes des autres. Il est présent dans tout l’arc alpin, dans certaines zones de la péninsule balkanique, dans le Sud de la Finlande, dans certains pays baltes et dans une petite zone de la Pologne, de la Roumanie et de la Hongrie. Grâce à des colonies dispersées et isolées il parvient à atteindre, en traversant l’Asie continentale, la Sibérie et l’Extrême-Orient. C’est une espèce strictement montagnarde et bien qu’il préfère vivre à des altitudes qui ne sont pas élevées on le rencontre dans des prairies ensoleillées jusqu’à 1800m.

Quatre sous-espèces ont été identifiées : Clossiana titania titania, Clossiana titania bivina, Clossiana miyakei et Clossiana titania staudingeri qui correspondent aux différentes zones où elles sont présentes.

Morphophysiologie

C’est un papillon de taille moyenne qui a une envergure alaire de 40 à 45 mm.

Comme cela a déjà été indiqué c’est le représentant le plus grand du genre Clossiana. Il est de  couleur brun orangé. La face supérieure de ses ailes antérieures est nettement ponctuée de motifs noirs de formes variées qui sont accompagnés d’une série de taches rondes de couleur noirâtre disposées en long et traversant en totalité la zone post-discale des deux ailes depuis la côte jusqu’au bord inférieur arrière. Comme chez la Clossiana dia il y a dans la zone basale de l’aile postérieure un duvet noirâtre et abondant qui forme une bande parallèle au corps.  Au centre on aperçoit de façon plus visible que chez la  la Clossiana dia un gros ocelle bordé de noir comportant au centre une pupille noire.

Clossiana titania, Nymphalidae

Un accouplement. Localisée dans des milieux montagnards elle se reproduit une seule fois par an © Giuseppe Mazza

Le revers de l’aile antérieure reproduit une partie du motif situé sur la face supérieure de façon plus nette que chez la Clossiana dia alors que l’aile postérieure est très particulière et présente les caractéristiques qui prédominent chez cette espèce.

Comme la Clossiana dia il a une couleur de base violet/lilas et possède une série de six ocelles légèrement bordés de noir dans la zone post-discale et dont se distingue le quatrième à partir du haut qui est complètement décoloré et dépourvu de contour.

La bande ininterrompue de petites taches de couleur blanc perlé présente chez la Clossiana dia dans la zone discale est par contre totalement absente. Chez la Clossiana titania elles sont remplacées par des taches noires dispersées sur un fond violet/lilas très soutenu. Il existe d’autre part juste au-dessous de la cellule une tache blanche petite mais bien visible sur fond lilas. Dans la zone discale et à côté de cette tache blanche on peut souvent observer un grand “X” de couleur jaunâtre. Il n’ y a pas l’angle très aigu de l’aile postérieure vers le bord supérieur qui  existe chez la Clossiana dia mais la courbure ici est normale. Ce papillon possède des antennes relativement longues et clavées constituées de segments alternativement blancs et noirs.

Biologie reproductive

Le Nacré porphyrin, du fait des caractéristiques des milieux où il vit, est une espèce monovoltine. Il pond ses œufs directement sur les plantes-hôtes ou sur un support situé à proximité. Après une courte incubation les chenilles se dispersent et vivent séparément. La chenille est de couleur noirâtre et recouverte de petites épines blanchâtres. Elle porte sur la tête deux appendices noirâtres qui ressemblent à de petites antennes. Le papillon hiverne au stade larvaire alors que la chenille est encore très petite puis s’alimente à nouveau et poursuit jusqu’au bout son développement quand apparaissent les premières chaleurs du printemps suivant.

Cette espèce n’est pas très précoce. Elle prend son envol au mois de juin et jusqu’au mois d’août suivant les endroits où elle vit. La chrysalide est fixée sur des rameaux des plantes-hôtes ou dissimulée dans des broussailles proches et reste à ce stade pendant une période d’environ trois semaines. Les plantes-hôtes appartiennent aux genre Viola, Rubus et Polygonum.

Synonymes

Papilio amathusia Esper, 1784; Argynnis amathusia Esper 1784; Boloria titania Esper 1793; Papilio titania Esper, 1794; Papilio cypris Meigen 1828.

 

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